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SAISON PUBLIQUE

Le Chemin des Miracles de Joby Talbot, interprété par le Tenebrae Choir, dirigé par Nigel Short, est la première œuvre « classique » que j’ai entendue en concert et de plus dans le cadre idéal de la basilique de Vézelay dont les artistes ont su exploiter le vaste espace. Je peux déjà affirmer que c’est l’un des concerts qui m’aura le plus marquée. Je ne savais pas à quoi m’attendre, mais cela n’a pas empêché la stagiaire des RMV live que je suis d’être totalement déconnectée de la réalité dans laquelle elle était plongée. Avant même de rejoindre la basilique, j’ai été impressionnée par les déplacements des chanteurs dans les couloirs de la Cité de la Voix.

21 heures : le spectacle commence dans une atmosphère d’emblée angoissante sur un bourdon de voix d’hommes. Quelque chose de théâtral s’installe dans toute la basilique, avec des déambulations accompagnées de subtiles lueurs bleues et vertes. Des chanteurs montent sur scène, leurs voix s’élèvent dans la pénombre ; des voix comme apeurées, menacées… La tension se fait sentir, les visages qui m’entourent traduisent une expression pesante mais contemplative. Le son lourd qui s’est installé persiste tandis que les hommes sont rejoints par les chanteuses. Tournés vers le chef, les regards des choristes montrent leur concentration. Si je ferme les yeux, ces premiers airs saisissants me donnent l’impression d’être au beau milieu d’un désert. Tout au long du spectacle, j’ai été séduite par les différents « décors » par lesquels j’ai pu passer ; avec la simple force de leur voix et sans jouer de leur corps, ils sont capables de dessiner un véritable tableau. En plus de l’oppression que j’ai pu ressentir, une des choses qui m’a le plus étonnée est la manière dont je suis parvenue à entendre distinctement chaque voix lorsque mon regard se fixait sur le visage de tel ou tel chanteur.

Le chant s’adoucit et en fermant les yeux, je me retrouve au beau milieu d’une forêt presque enchantée. Je vois beaucoup de verdure, de grands sapins, des cours d’eau scintillants, parcourus d’une brise d’air frais. Par la suite, la pièce prend de l’espace, les chanteurs déambulant jusqu’à finir dans le fond de la basilique. Privée d’une vue sur eux, je me concentre sur le son et, sur mon carnet de notes, je me mets à dessiner des lignes ondoyantes et entremêlées. Avec l’écho de la basilique et le chant devenu plus calme, je me sens comme perdue dans les fonds marins, nullement effrayants, mais plutôt quelque chose d’apaisant, comme un sanctuaire coupé du monde et de l’ensemble du spectacle. À la fin du concert, les chanteurs regagnent la scène, chant apaisé face à moi : cette fois-ci, la vision d’une montagne me vient.

Tel une pièce de théâtre, ce Chemin des Miracles m’a fait voyager et m’a transporté, comme rarement auparavant, à travers différents lieux et états. La note finale s’éteint : un tonnerre d’applaudissements résonne, comme j’en ai rarement entendu. Face à une standing ovation spontanée, les visages de Nigel Short et de ses chanteurs s’illuminent, reconnaissants et émus. Un sentiment que je partage aussi, le regard brouillé par l’émotion. Une œuvre envoûtante ; une première expérience que je renouvellerai avec plaisir.

Vézelay, 26 août 2023 

Photos © Vincent Arbelet


RMV… live !

Sarah Michaux, élève en information communication, passionnée par le monde de la musique et des concerts. Spectatrice assidue, elle est très intéressée par tout ce qui compose un concert ou festival de sa conception à sa réalisation. Elle peut s’infiltrer sur le terrain avec son téléphone afin de filmer les moindres détails qui attisent sa curiosité.